Boutargue ou Poutargue

Pour les non Méridionaux, ces mots poutargue ou boutargue peuvent paraître un peu étrange et ne pas évoquer d’image très concrète. Pour les Méridionaux ou les amateurs dont le nombre augmente à Paris comme dans toutes les régions , ils évoquent une spécialité culinaire de luxe. Un mets que l’on peut déguster soit à l’apéritif, soit dans des plats cuisinés et dont l’arôme fait naître des images de soleil et de mer.

Pourtant, s’il est peu connu dans le nord de notre pays, le mot boutargue est attesté en France depuis le 15ème siècle, selon le Dictionnaire Culturel en Langue française. Boutargue est identifié comme un emprunt au provençal boutargo et l’on en trouve des formes proches en italien, en espagnol, en arabe, qui dériveraient toutes d’un même mot copte. Quoi qu’il en soit, les mots poutargue ou boutargue désignent « un mets provençal composé d’œufs de mulet (appelé aussi muge ou mujou en provençal) salés, pressés, séchés et épicés ». Cette préparation n’est donc pas exclusivement provençale et elle existe tout autour du bassin méditerranéen, en Italie, en Grèce, en Turquie, en Algérie ou en Tunisie. Pour l’anecdote, on peut même signaler que les Japonais, grands amateurs de poisson séché, l’apprécient et la consomment sous le nom de karasumi.

Selon la tradition, ce sont les Grecs de Phocée, fondateurs de Marseille (Massilia à l’époque) qui auraient amené avec eux cette manière de préparer et de conserver les poches d’œufs de poissons, vers 2600 avant notre ère. C’est dire si cette tradition est ancrée profondément dans la culture locale !

En France, la poutargue ou boutargue est devenue un mets de luxe, très recherché pour sa saveur très particulière, à la fois forte et iodée. On la dénomme aussi « caviar de la Méditerranée », car, comme le caviar, elle est préparée à partir d’une poche d’œufs ou « caviar martégal », car c’est LA spécialité de la ville de Martigues, située au bord de l’étang de Berre, dans les Bouches-du-Rhône. Pourquoi Martigues ? L’explication est logique : autrefois, les mulets femelles remontaient le canal de Caronte qui relie l’étang de Berre à la Méditerranée et pondaient dans ses eaux chaudes avant de retourner en mer. Les pêcheurs locaux tendaient alors de filets appelés calens entre les deux rives du canal et prélevaient les poches d’œufs des femelles.

A l’heure actuelle, le mulet s’est raréfié et cette pêche traditionnelle, devenue marginale n’est pas suffisante pour la demande. Les producteurs de poutargue ou boutargue doivent donc se tourner aussi vers l’international. C’est le cas pour la conserverie La saveur des Calanques, installée sur le port de pêche à Port-de-Bouc, quai des Sardiniers, au débouché du canal de Caronte, qui perpétue un savoir-faire artisanal. Selon la saison de pêche, elle se tourne vers des importations notamment brésiliennes ou nord-américaines.

La poche d’œufs ou rogue doit être prélevée avec délicatesse pour ne pas endommager la fine membrane qui la recouvre. Elle est ensuite nettoyée, salée, déveinée (pour obtenir une meilleure qualité gustative), légèrement aplatie, séchée avant d’être proposée à la vente. Ainsi formulée, la recette paraît simple mais tout le savoir-faire réside dans le dosage du sel, le temps de séchage, la maturation de la jambe de poutargue… Le connaisseur appréciera la couleur, la texture, les arômes et pour finir la saveur caractéristique.

A la boutique de La saveur des calanques, sur son site internet ou encore dans les poissonneries et épiceries fines qui la commercialisent, vous la trouverez entière, nature, sous vide ou cirée, en poudre. La boutargue entre dans la composition de plusieurs recettes originales et vous apprécierez la qualité des produits proposés par ce jeune couple dynamique qui a placé la poutargue au cœur de son activité et marie dans sa gamme de produits tradition et innovation.

Alors, poutargue ou boutargue ? Peu importe pourvu que le mets soit d’une belle couleur ambrée, savoureux, d’une texture moelleuse et, en un mot, séduise celui qui le déguste !

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